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(93) Le tribunal administratif de Montreuil réclame des améliorations des conditions de garde-à-vue au commissariat de Bondy

(93) Le tribunal administratif de Montreuil réclame des améliorations des conditions de garde-à-vue au commissariat de Bondy
© Google Street View
Publié le 28/12/2023 à 13:08

La juridiction a enjoint le ministère de l'Intérieur de déplacer le local servant pour les consultations avec les avocats, lesquelles se déroulent dans les toilettes du bâtiment depuis cet été, et demandé une amélioration des conditions de détention.

À la suite d’un référé « mesures utiles » déposé le 6 décembre par des avocats du barreau de Seine-Saint-Denis devant le tribunal administratif de Montreuil, la juridiction a rendu une ordonnance, mercredi 13 décembre, allant dans le sens des demandes formulées par la profession.

Dans sa décision, elle demande notamment au ministère de l’Intérieur de « déplacer le local ‘entretien avocat’ (…) dans un délai de trois mois » sous peine de 250 euros d’amende par jour de retard, comme le rapporte le Bondy Blog, qui a pu avoir accès au texte rendu.

Les services de l’Etat sommés de rénover des cellules « insalubres »

Depuis cet été, les avocats étaient en effet contraints de rencontrer les gardés à vue dans les toilettes du commissariat. Des problèmes qui trouvent leur origine dans les émeutes consécutives à la mort du jeune Nahel, la pièce habituellement utilisée pour ces entretiens ayant été réquisitionnée par les renforts des forces de l’ordre.

Le tribunal administratif de Montreuil a donc réclamé mercredi des améliorations significatives des conditions de garde-à-vue. Plus que cela, il exige du ministère de l’Intérieur qu’il fasse rénover les cellules du commissariat de Bondy « insalubres » et vieillissantes. Il ordonne en outre l'installation de toilettes correctement aérées et chauffées pour garantir l'hygiène des espaces, révèle Franceinfo, mais aussi le nettoyage quotidien des cellules et l’installation de sonnettes pour que les gardés à vue puissent accéder aux toilettes et à un point d’eau quand ils le souhaitent, évoque de son côté le Bondy Blog.


Depuis juillet 2023, les avocats reçoivent leurs clients dans les toilettes du commissariat de Bondy © Capture d'écran du rapport du bâtonnier de Seine-Saint-Denis

L’ordonnance demande par ailleurs aux autorités de distribuer les kits d'hygiène disponibles dans tous les commissariats de France, conformément à ce qui avait été réclamé par les avocats. En effet, les kits d'hygiène normalement obligatoires pour les personnes en garde à vue, et comprenant des lingettes, du dentifrice, et des serviettes hygiéniques pour les femmes, ne sont pas systématiquement distribués, ou périmés. Affirmant que « l’insuffisance notoire de la distribution de ces éléments de base est attentatoire au respect de la dignité des personnes et ne permet pas que les gardes à vue se déroulent dans des conditions matérielles conformes aux exigences de l’État de droit », toujours d’après le Bondy Blog, la juridiction laisse un mois aux services de l’Etat « sous astreinte de 100 euros par jour de retard » pour distribuer ces kits. 

Des manquements déjà identifiés en 2013

 « L'accueil des plaignants Bondynois, les rendez-vous avec les avocats, les conditions de travail des officiers de police judiciaire... rien ne se déroule correctement dans ce commissariat, il est urgent de s'en occuper impérativement  », a de son côté confirmé le maire de Bondy, Stephen Hervé, auprès de Franceinfo. L’édile soulignait également que le commissariat couvre deux communes, Bondy et les Pavillons-sous-Bois, comptant près de 80 000 habitants au total, une charge bien trop importante pour un seul établissement.

La situation actuelle reflète des problèmes persistants observés depuis longtemps et qui remontent plus précisément à 2013, date à laquelle un rapport du contrôleur général des lieux de privation de liberté mettait déjà en lumière les conditions d'accueil difficiles du commissariat, et des manquements inquiétants. À l’époque, le rapport en question mentionnait qu'aucun matelas ni couverture propre n'était disponible pour les personnes interpellées, que les relevés de température indiquaient environ 15 degrés, et que les cellules étaient signalées comme particulièrement sales, sans démarche pour garantir un minimum d'hygiène aux gardés à vue.

Le cas Bondy, un précédent ?

Toutefois, la préfecture de police de Paris a indiqué que des travaux seraient effectués début 2024 dans le commissariat, pour un montant estimé à près de 200 000 euros.

Selon l'avocat Arnaud Dilloard, cité par Franceinfo, cette affaire pourrait marquer le début d'une prise de conscience plus large : « D'autres commissariats du département vont suivre, Bondy est loin d'être le seul commissariat du 93 à accueillir des gardés à vue dans des conditions indignes. »

Romain Tardino

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