Le 14 décembre, le Conseil constitutionnel a donné
son feu vert concernant la loi de programmation des finances publiques
2023-2027, contestée par les députés du RN qui en demandaient la censure. Mais
l'institution n'a pas apporté de réponse à une interrogation cruciale : la
possibilité pour le gouvernement d'avoir recours une nouvelle fois à l'article
49.3.
Le gouvernement pourra-t-il faire recours une
énième fois au 49.3 ? C'est la question qui se pose après la décision rendue par le Conseil
constitutionnel ce jeudi 14 décembre sur la loi de programmation des
finances publiques 2023-2027. En vérité, on ne sait pas… En effet, les Sages ne
se sont pas réellement prononcés sur cette question et ont rejeté le recours
déposé par les députés du Rassemblement national qui réclamaient la censure de
la loi. Ces derniers dénonçaient notamment la mise en œuvre successive de la
procédure du 49.3 sur ce texte à deux reprises : d'abord en session
extraordinaire fin septembre, puis lors d’une session ordinaire mi-novembre.
Une seule utilisation de 49.3 par session
Avec ce recours, le parti de Marine Le Pen
espérait ainsi établir une jurisprudence sur l'utilisation du 49.3. En
principe, le gouvernement peut déployer cet article pour un seul et unique
texte de loi par session parlementaire, à l'exception de son utilisation
illimitée pour les budgets de l’État et de la Sécurité sociale (la loi de
programmation des finances publiques 2023-2027 n’étant pas un texte
budgétaire). Néanmoins, le Conseil s'est limité à annoncer la légitimité du
recours à cet outil constitutionnel mi-novembre, sans forcément préciser si
l'exécutif avait déjà épuisé son utilisation de l'article 49.3 en dehors des
budgets.
Le RN contestait également le recours au 49.3
annoncé le 13 novembre dernier par le ministre des Relations avec le Parlement, Franck Riester, au
nom de la Première ministre Élisabeth
Borne, alors en déplacement en Irlande pour discuter des enjeux internationaux. Le
groupe d'extrême droite estimait que cela aurait dû être autorisé par un «
décret attribuant l’intérim », une remarque rejetée par le Conseil
constitutionnel, qui estime qu'un membre du gouvernement peut agir en lieu et
place de sa cheffe.
Une utilisation qui serait conforme à la
constitution ?
Alors, que faut-il comprendre ? le 49.3 a-t-il été
employé lors de deux sessions, comme l'affirme le RN ? En réalité, le
gouvernement se défend en argumentant que cette loi de programmation des
finances publiques avait déjà été adoptée en première lecture par l'article
49.3 en septembre, lors d'une session extraordinaire, laissant entendre la
possibilité de déclencher un autre recours au 49.3. « Le Conseil
constitutionnel déduit que la loi déférée a été adoptée selon une procédure
conforme à la Constitution », précise l’institution dans sa décision.
À présent, il
semble que le Conseil attende l'utilisation effective du 49.3 pour prendre une
décision définitive sur cette question. Cependant, l'absence de réponse claire
des Sages semble laisser au gouvernement un atout de taille, surtout après le
rejet en première lecture du projet de loi sur l’immigration. Récemment, Emmanuel Macron excluait un
recours au 49.3 mais l'avenir réserve parfois des surprises. Affaire à
suivre...
Romain Tardino